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Psychologue en cabinet libéral, je reçois un public majoritairement adulte. Après avoir travaillé une dizaine d’années dans le champ de la protection de l’enfance, je me suis essoufflée à porter la parole des enfants face à des institutions sourdes et parfois maltraitantes.
Et je dois dire que la situation que nous vivons depuis plus d’un an me rappelle étrangement des situations et ressentis déjà vécus dans ce passé professionnel.
Nous sommes le 01 Juin 2021. Journée de consultations habituelle à mon cabinet.
Il est 15h, je reçois Mathilde, maman de 4 enfants, qui arrive effondrée, me confiant ses inquiétudes face aux comportements de son cadet. Ce collégien de12 ans a développé des tics très importants depuis plusieurs mois, mais aussi et surtout, est en proie à des phobies d’impulsion de … faire du mal aux gens qu’il aime. Oui, vous avez bien lu : cet enfant de 12 ans, sans antécédent psychologique, a aujourd’hui peur de faire du mal à ses proches, la nuit, dans son sommeil, sans s’en rendre compte. Cet enfant a donc développé tout un rituel le soir pour s’endormir : il ferme sa porte, met plusieurs objets devant pour la bloquer et ne pas risquer de sortir. Ce jeune garçon est terrifié à l’idée de devenir fou, de perdre pied et commettre l’irréparable. Bien évidemment, Mathilde est extrêmement inquiète et démunie pour aider son fils.
Mathilde m’explique que le papa est un homme anxieux par la maladie, convaincu que son fils puisse être vecteur de contamination et se maintient, par protection, à distance de lui depuis 1 an. Nous voyons ici que la désinformation des adultes alimente leurs propres peurs et ne leur permet plus de rester ancrés, raisonnés, et capables de rassurer leurs propres enfants. Les enfants deviennent alors le réceptacle des angoisses des adultes.
Les phobies d’impulsion sont bien connues chez nous, les psys. Elles sont pour la grande majeure partie du temps des conséquences liés à des traumatismes antérieurs. La peur de passer à l’acte, la peur de faire du mal à l’Autre ou à soi-même envahit alors tout l’espace psychique de la personne qui a l’impression de devenir folle.
Quel lien entre les phobies d’impulsion de cet ado et la situation actuelle de crise sanitaire ?
Ce que nous vivons depuis plus d’un an est anormal. Nous vivons dans une société où tous les ingrédients pour concocter un psychotraumatisme sont en place : isolement, confinements, restrictions des libertés, perte de repères, difficulté de se projeter, peur de la mort, peur de soi, peur de l’Autre, culpabilisation, absence d’accès aux sources de plaisir, injonctions paradoxales, infantilisation… tout y est. Absolument tout.
Et que dire de ces messages véhiculés dans les médias, les réseaux sociaux, les affiches dans la rue, le métro, les publicités en tous genres dans lesquels les enfants sont considérés comme potentiellement responsables de la contamination de leurs parents ou grands-parents, et éventuellement de leurs morts ? Qu’intègrent ces jeunes à travers ces messages effrayants ? Une petite fille de 7 ans que j’accompagne me disait récemment « même si je vais bien, je dois rester loin de mes parents, on ne sait jamais, je pourrais leur donner le Covid et ils pourraient mourir ». Les mots de cette enfant, les phobies d’impulsion du fils de Mathilde et tant d’autres témoignages confiés au sein de nos cabinets de psychologues, nous montrent à quel point les enfants souffrent de ce climat.
Depuis plusieurs mois, les services de pédopsychiatrie débordent de demandes de prises en charge pour des enfants et adolescents qui vont très mal. Jamais nous n’avons assisté à une telle situation dans le monde de la santé mentale. Les professionnels libéraux et hospitaliers témoignent de manifestations dépressives, troubles anxieux, Troubles Obsessionnels Compulsifs, Troubles du Comportement Alimentaire, troubles du sommeil, passages à l’acte suicidaire… chez des enfants et adolescents sans antécédent psychologique.
Pour en revenir à Mathilde : son fils semble en effet aujourd’hui être en proie à des angoisses massives générées par la situation de stress chronique dans laquelle nous maintenons enfermés les enfants. Les communications culpabilisantes, effrayantes, dirigées vers eux sont tout simplement scandaleuses, au regard des études existantes. Les professionnels de la santé ne peuvent ignorer les conséquences que ce type de communication génère chez cette population jeune, vulnérable car en construction.
En mars ou avril 2020, face à cette situation totalement inattendue et nouvelle, nous avions des raisons légitimes d’avoir peur et prendre nos précautions. Mais après plus de 1 an, les études montrent clairement et sans équivoque que la Covid n’est pas une maladie pédiatrique, que le virus touche très peu les enfants et que ceux-ci font très peu partie de la chaine de contamination, que ce sont majoritairement les adultes qui les contaminent et pas l’inverse.
Comment alors comprendre que le plan de déconfinement en œuvre depuis le 3 Mai 2021 en France permette aux adultes de se rendre en terrasse, aux restaurants, de recommencer à se divertir … mais que nos enfants ne puissent pas ôter ce masque, véritable objet contra phobique qui leur rappelle à tout instant qu’ils sont potentiellement dangereux ? Pourquoi ne pas leur permettre de retrouver leur école « comme avant », si précieuse pour leurs vies d’enfants ?
Comment comprendre que des députés interpellent l’Assemblée Nationale (comme l’a fait par exemple Madame Frédérique Meunier le 26 Mai) pour relayer les inquiétudes des professionnels et ne soient pas entendus ?
Comment comprendre que de si nombreux collectifs de professionnels (orthophonistes, psychologues, pédopsychiatres, pédiatres…) tirent la sonnette d’alarme depuis des mois concernant la santé des enfants et ne soient pas pris en considération ? Il n’y a pas de discussion, de débat, d’échange avec les acteurs de terrain.
Comment comprendre que des collectifs de parents, inquiets pour le bien être de leurs enfants, témoignant de ce que vivent leurs enfants, demandant par exemple une étude d’impact sur les conséquences du port du masque pour une population si jeune, restent sans réponse ?
En tant que professionnelle de la santé mentale, garante de l’intégrité psychique des enfants que j’accompagne, je questionne aujourd’hui la manière dont nous protégeons nos enfants. Car si la stratégie choisie réside en une utilisation consciente et un maintien volontaire dans ce climat de peur et de culpabilisation de nos enfants, si délétère pour la construction de leur système nerveux et de leur sentiment de sécurité, ce serait clairement une maltraitance et une atteinte à leur intérêt supérieur.
Aussi, concernant les postures parentales, il est impossible d’agir de manière raisonnée et sécure, de prendre une décision consciente, de consentir de manière éclairée dès lors que nous baignons dans un climat de peur et d’urgence. De nombreux parents se trouvent aujourd’hui dans un état d’épuisement de cette situation, de peur pour leur avenir et celui de leur enfant, se résignant à consentir malgré eux aux mesures imposées.
Comment ai-je réagi face à Mathilde en larmes, pensant à la détresse de son fils ?
Nous avons pris un moment pour qu’elle s’apaise, pour qu’elle reprenne pied. Nous avons respiré ensemble, je lui ai dit qu’elle n’était pas seule avec cela, que nous allions réfléchir ensemble à cette situation pour aider son fils. Mathilde s’est apaisée en quelques minutes, et a retrouvé sa capacité de penser, de nuancer, de communiquer avec moi. En l’aidant à s’apaiser, à se rassurer, en l’aidant à accéder à des informations nuancées, Mathilde s’est reconnectée à sa fibre maternelle, et s’est sentie plus capable de rassurer son enfant.
J’ai apporté des informations et leurs sources à Mathilde, faisant appel à ses capacités de discernement et de réflexion, en lui expliquant notamment l’urgence de rassurer son fils. Pour ce faire, je l’ai invité à aller chercher des informations différentes que celles véhiculées dans les médias officiels, si complices de cette situation.
Nos enfants ont peur de devenir fous. Nos enfants sont le reflet de notre société qui effectivement perd gravement pied.
J’encourage tous les parents que nous sommes, mais aussi les professionnels, à s’informer ou se réinformer en URGENCE, afin de pouvoir RASSURER les enfants, reprendre nos pleines responsabilités d’adultes. Car nos enfants n’ont pas à subir nos peurs et porter nos responsabilités. Ils méritent de grandir auprès de figures d’attachement sécurisantes et rassurantes. Il en va de la construction de leur personnalité et de leur sentiment de sécurité interne.
https://www.europe1.fr/sante/pedopsychiatrie-le-systeme-etait-deja-sature-juge-une-membre-du-conseil-scientifique-4027999
https://www.francetvinfo.fr/sante/enfant-ado/covid-19-les-hospitalisations-en-pedopsychiatrie-ont-explose-de-80_4344365.html
https://www.sfpediatrie.com/actualites/enfant-covid-actualisation-propositions-sfp
https://www.infovac.fr/?view=article&id=847&catid=45
https://collectifdesantepediatrique.fr/nos-actions/manifeste/
https://www.realites-pediatriques.com/covid-19-chez-lenfant/
https://france3-regions.francetvinfo.fr/nouvelle-aquitaine/correze/brive/frederique-meunier-deputee-lr-de-correze-prend-position-contre-le-port-du-masque-pour-les-enfants-2107381.html
Ce que j’aimerais dire à tous les enfants :
Non, tu n’es pas dangereux. Le risque que tu contamines les adultes est infime.
Non, tu n’as pas à protéger les adultes, c’est à eux de se protéger
Non, tu ne coures pas un risque en jouant avec ton copain aux Pokémons
Non, tu n’as pas à obéir à tout prix et à te soumettre
Mais :
Oui, tu as des droits
Oui, tu as le droit de respirer librement
Oui, tu as le droit de trouver injuste de devoir copier des lignes parce que tu as baissé ton masque
Oui, c’est aux adultes de te protéger et de veiller sur toi
Oui, c’est aux adultes de se protéger s’ils estiment qu’ils sont à risque ou s’ils ont peur
Oui, tu as le droit de sentir que tout cela n’est pas logique
Oui, tu as le droit d’avoir envie que tout cela s’arrête
Oui, tu as le droit d’avoir peur quand tu vois des affiches ou publicités qui font peur
Oui, tu as le droit de retrouver ta joie de vivre et de profiter de ta vie d’enfant.
Ce que j’aimerais dire à tous les parents :
Non, vous n’êtes pas responsables de la gestion de cette crise
Non, vous n’êtes pas responsables du choix des informations qui sont diffusées et de la propagande par la peur
Non, vous n’êtes pas responsables de l’absence de débat et discussion contradictoires
Non, vous n’êtes pas responsables des protocoles sanitaires imposés et parfois absurdes
Non, vous n’êtes pas responsables de ne pas savoir quoi faire, de vous sentir impuissants
Mais :
Oui, vous avez le droit d’être en colère, d’avoir peur, de vous sentir déconnectés, de vouloir que tout cela s’arrête, de ne plus rien comprendre, de vous sentir perdus et impuissants
Oui, vous êtes responsable d’apprendre à gérer vos propres peurs afin que ca ne soit pas à vos enfants de le faire
Oui, vous avez à vous informer concernant les bénéfices et les risques et d’évaluer vos décisions (tests, vaccins…) en conscience
Oui, vous avez le droit de douter et de poser vos questions à plusieurs interlocuteurs, et de vous opposer
Oui, vous êtes responsables de vos enfants, de leur sécurité physique et affective et des décisions que vous prenez pour eux
Car il est urgent de reprendre pied et de rassurer nos enfants.
Yoanna Micoud, psychologue. Le 01/06/21
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